Cyana

Univers fictions

Mercredi 31 octobre 2012 à 22:11

Participation à la nuit des lemons du 31 octobre 2012, du forum Ficothèque Ardente.
Pour cette soirée consacrée à Halloween, le premier thème était : les vampires. Les trois mots à placer étaient les suivants : félin, flamme et tremblement. Défi relevé !
Je n'ai pensé à aucun fandom en particulier en écrivant ce très court os, donc la conclusion logique est qu'il s'agit d'une originale et que tout m'appartient. Bonne lecture.
Elle n'aurait pas dû sortir

Elle n’aurait pas dû sortir ce soir.

Oh non, vraiment pas. Ce soir-là, les créatures fantasmagoriques étaient de sortie, pour la nuit qui leur était consacrée. Et si elle n’était pas sortie, rien de tout cela ne serait arrivé. Mais n’était-ce pas merveilleux que ceci lui arrive ?

Les mains fines de la créature exploraient son corps en une caresse lascive, terriblement appréciable mais surtout terriblement diabolique. Elle s’arqua d’un seul coup sous la douceur de ces deux mains chaudes sur sa peau et poussa un halètement. Terreur, plaisir ? Dans l’état dans lequel elle se trouvait, elle n’en savait plus trop rien elle-même.

Ses frissons se changèrent en tremblements quasiment incontrôlables alors qu’une langue taquine parcourait sa gorge et un ricanement moqueur échappa à la créature. Celle-ci prenait un malin plaisir à lui faire ressentir des émotions en contraction avec ce qu’elle lui faisait vivre. Mais elle n’arrivait même pas à lui en vouloir. Elle n’arrivait pas non plus à s‘effrayer. Elle n’arrivait plus à rien, seul comptait pour elle ce plaisir brûlant dans lequel elle plongeait sans retenue.

Elle n’aurait pas dû sortir, n’est-ce pas ?

Seuls les démons tout droit sorti des plus chaudes et diaboliques flammes de l’enfer pouvaient procurer de telles sensations en ôtant la vie. Ils étaient des êtres aussi diaboliques que divins. La différence était trop mince pour les classer dans une seule catégorie.

Quand il s’était approché d’elle, dans cette rue pas très fréquentée, elle n’avait vu en lui qu’une incarnation divine, pas l’horrible créature qui se cachait sous le masque de marbre et le superbe sourire. Elle s’était laissée emporter sans opposer la moindre résistance, envoûtée par le charme félin et terriblement attirant qu’il dégageait. Elle n’avait pas pu lutter mais ne se sentait pas coupable : aucun humain ne pouvait résister à ces créatures. Cette-nuit, elle était la proie, la créature en avait décidé ainsi. Qu’était-elle pour s’opposer à un dieu ?

Non, elle n’aurait pas dû sortir. Mais elle ne regrettait pas. Il lui était impossible de regretter quoi que ce soit. La créature gémit à son tour, elle était lassée de s’amuser avec sa proie. Jouer ne lui convenait plus, elle devait être impatiente de pouvoir enfin savourer le mets de choix qui lui avait été servi sur un plateau. Après tout, elle n’avait vraiment opposé aucune résistance. Il n’y avait pas eu de chasse, pas de course-poursuite, rien de suffisamment excitant pour cette créature qui aimait la résistance et le challenge.

Il était temps d’en finir.

Deux crocs se plantèrent dans la gorge de la jeune victime, avec une telle délicatesse qu’elle n’en ressentit qu’un doux mordillement qui la plongea dans un abîme de sensations toutes plus plaisantes les unes que les autres. Elle gémit et rejeta la tête en arrière, réclamant plus. Elle sentit la créature sourire contre sa peau. Il se moquait d’elle. Que diable ! Elle n’en avait plus rien à faire.

Mourir était un délicieux plaisir.

Elle ferma les yeux dans un dernier soupir de bien-être, laissant la créature se gorger de son fluide vital dans opposer la moindre résistance.

Non, décidément, elle n’aurait pas dû sortir. Mais il était trop tard pour s’en rendre compte.

Samedi 27 octobre 2012 à 12:00

INUTILE

Résumé : Je me sens tellement inutile. Si je n'étais pas là, je ne vois pas qui s'en soucierait véritablement. Mais je ne veux pas disparaître, j'ai trop peur de ce qu'il y a après, ça me terrifie ! S'il te plaît, prends-moi dans tes bras, serre-moi fort, prouve-moi que j'existe au moins à tes yeux, puisque tu te sens seul, toi aussi. 
Attention, cette fiction contient une scène sexuelle, pas extrêmement détaillée mais présente, et quelques idées dépressives et morbides,  de l'alcoolisme (il ne faut surtout pas suivre l'exemple des personnages). 
Les personnages proviennent du manga Hetalia et appartiennent à Hidekaz Himaruya. Si je me suis trompée sur l'orthographe, je m'en excuse. 
Ce texte a été écrit dans le cadre des défis "le mouvement perpétuel", organisé par la Ficothèque Ardente. Il s'agissait pour ce défi d'écrire un one-shot entre 500 et 5000 mots en s'inspirant d'une photo (de la Faucheuse) et en utilisant certains mots (joie, libre, rire, aimer, bonheur et nuage) que j'ai mis en gras dans le texte. J'ai relevé le défi, je ne suis pas totalement satisfaite de rendu final et je sais que je le réécrirais un jour. Plutôt que faire une death-fic comme pourrait le faire croire la représentation de la Mort, j'ai préféré utiliser une autre facette de son image, celle de la destruction, essentiellement morale. Rien de très joyeux quand même. Bonne lecture, j'espère.
 

_ Comment l’aimes-tu ?

Suisse cessa d’astiquer son fusil, étonné de la question. Liechtenstein se tenait bien droite devant lui, ses petites mains serrées l’une contre l’autre.

_ Je te demande pardon ?

_ Je…je voudrais savoir…à quel point tu l’aimes…

Le fusil fut lentement posé sur la table à côté de laquelle Suisse travaillait. Il tenta d’accrocher le regard de Liechtenstein qui persistait à garder les yeux baissés sur les motifs alambiqués du tapis.

_ De quoi parles-tu ?

_ De…Oh, grand frère, tu sais très bien de qui je parle !

La jeune fille osa enfin croisa le regard vert de son protecteur.

_ Tu…tu pensais à lui, je le sais, tu marmonnais…Tu marmonnes toujours quand tu penses à lui…Tu penses toujours à lui !

_ Gretchen, de qui…

_ S’il te plaît…S’il te plaît, Basch ! Ne me mens pas, pas à moi !

Suisse écarquilla les yeux, sous le choc : c’était terriblement rare que la petite Liechtensteinoise l’appelle par son prénom, l’appelle autrement que « grand frère ». Il ne pouvait qu’en être ahuri.

_ Je ne veux pas te mentir…balbutia-t-il.

_ Alors, dis-moi. Dis-le moi au lieu de me laisser espérer…Je t’en supplie !

Gretchen prit les mains de son frère entre ses mains et plongea ardemment ses doux yeux dans les siens.

_ Dis-moi que tu l’aimes. Dis son nom. Dis-le !

Terrorisé, Suisse secoua la tête.

_ Lily, tu…hoqueta-t-il. Qu’est-ce qui te prend ? Tu n’es…pas dans ton état normal.

_ Basch, je suis exaspérée ! S’exclama la jeune fille. Je t’aime, je t’adore, mais tu ne me regardes pas ! Tu ne me vois pas ! Tu n’as que cet autre dans le cœur, dans la tête ! Il faut que tu l’exorcises, autant pour moi que pour toi !

_ Je…

_ Basch, je vais très bien, lui assura Gretchen avec un sourire doux. Je veux juste ton bien, tu sais. Et tu as trop tendance à croire que je suis une toute petite fille…Basch…Tu sais, je t’aime, je t’aime vraiment…

_ Lily…

_ Je t’aime, mais je sais que ce n’est pas réciproque…Je sais que tu aimes quelqu’un d’autre, tu le sais aussi, tu es loin d’être idiot…

_ Je ne veux pas parler de ça !

_ Mais ça me fait souffrir !

Suisse déglutit.

_ C’est pas…je ne l’aime pas ! C’est un imbécile, et…!

_ C’est toujours le même refrain, grand frère…soupira Liechtenstein.

Des larmes brillaient dans ses yeux, Suisse ne put soutenir une telle vue et regarda ailleurs.

_ Tu es malheureux. Et lui aussi. Je ne suis pas la seule à le voir, tu sais…

_ Q-Quoi ? !

_ Hongrie, Prusse. Tu sais, ils sont heureux, tous les deux. Il n’y a rien qui vous retienne, tu sais…Pourquoi tu hésites encore ? Vous n’êtes pourtant plus des enfants…

_ Je…

_ Grand frère, s’il te plaît. Dis-le. Dis que tu aimes Autriche. Il le faut.

_ Lily…

Suppliant, Suisse essayait d’interrompre sa petite sœur dans son sermon. Il ignorait pourquoi elle tenait absolument à ce qu’il avoue des sentiments inexistants envers ce type qu’il méprisait, il ignorait pourquoi elle avait lancé cette conversation et cette situation le mettait dans un état proche de la crise de nerfs.

_ Je l’aime pas, enfin…

_ Mais si, tu l’aimes !

_ Mais non, voyons ! Pourquoi j’aimerais ce type ?

_ Et pourquoi pas ?

L’argument était certainement parable, mais Suisse ne trouva rien à répliquer. Liechtenstein eut un sourire triste.

_ Tu pourrais au moins me le dire à moi…on se fait confiance, non ?

_ C’est pas le problème…

_ Moi, je crois que si. Je pensais qu’entre nous, c’était…différent. Je sais que tu ne ressens que de l’affection pour moi, pas de l’amour, mais je pensais qu’on se faisait confiance. Qu’on se disait tout.

_ C’est le cas…

_ Pourquoi tu as honte ? Parce que c’est un garçon ?

_ Mais arrête, bon sang ! !

Lily se tut et poussa un soupir désabusé.

_ Je…vois…Si tu es persuadé que nier est la meilleure solution, je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus.

_ Je…

_ Je suis désolée de t’avoir embêtée, tu sais, grand frère. Je voulais juste…mais ce n’est pas grave. Excuse-moi.

Liechtenstein tourna les talons et prit la direction de la porte. Elle regrettait d’avoir échoué mais songeait déjà à une nouvelle approche, peut-être plus délicate. Et puis, qui savait, Suisse avait peut-être besoin d’un peu de temps pour assimiler ce qu’il ressentait…

_ Lily !

L’adolescente s’arrêta, une main sur la poignée, et se tourna vers son protecteur.

_ Tu…tu crois vraiment ? Souffla-t-il.

Elle sourit avec douceur, l’espoir refaisant surface. Hongrie avait eu raison de lui dire de prendre le taureau par les cornes.

_ J’en suis sûre.

Suisse marmonna un juron en enfouissant son visage entre ses mains. Compatissante, Liechtenstein le rejoignit et le prit dans ses bras malgré sa tristesse.

_ Ce n’est rien, chuchota-t-elle. Ça va aller…C’est n’est pas grave, bien au contraire ! Tu aimes, c’est plutôt merveilleux.

_ C’est de toi que j’aurais dû tomber amoureux.

_ Bien entendu, j’aurais bien aimé, moi aussi, essaya de plaisanter la jeune fille.

Elle posa un baiser délicat sur le front de son amour, comme pour l’assurer qu’il n’avait rien à craindre, qu’elle lui accordait sa bénédiction. Ce geste la brisait, mais elle sentait qu’il était temps qu’elle abandonne. Elle ne pouvait pas gagner la lutte, il valait mieux renoncer à Suisse.

_ Je vous souhaite beaucoup de bonheur, tu sais, murmura-t-elle. Sincèrement.

_ Lily…

Suisse referma ses bras sur la taille fine de sa petite sœur et appuya sa joue sur son ventre. La jeune fille lui caressa les cheveux, profitant de ce dernier geste ambigu qu’ils auraient l’un envers l’autre.

Car maintenant que les choses avaient été mises au clair, plus rien ne serait comme avant.

_ Je ne t’embêterais plus, promit-elle. Désormais, tu es libre.

Gretchen renifla en enfouit une énième fois son visage dans son mouchoir.

_ Allons…murmura Belgique en lui tapotant le dos.

Elle tendit gentiment un chocolat à son amie qui le prit et le mâchonna sans appétit. A chaque nouvelle crise de larmes, Manon lui en tendait un et l’adolescente commençait légèrement à saturer. L’idée vague commençait à émerger d’arrêter de pleurer pour ne pas finir par exploser.

_ Je sais que tu es malheureuse, soupira la jeune femme. Mais tu as renoncé à lui de ton plein gré. Tu savais que c’était inéluctable.

_ Oui, mais…bafouilla Gretchen. Je…c’est si dur…

Elle hoqueta et réussit bravement à retenir de nouvelles larmes. Depuis deux jours qu’elle était arrivée chez Belgique pour changer un peu d’air, elle avait passé son temps à pleurer. Son amie l’avait laissée évacuer son chagrin tout son soûl mais avait décidé de la secouer un peu.

_ Allez, ça suffit, décida-t-elle d’une voix forte. Sèche-moi ces dernières larmes, passe un coup d’eau sur ce minois tout blême et mets ton chapeau. Je t’emmène visiter les merveilles de chez moi !

_ Que…

_ Pas de discussions. Allez, allez, allez !

Balbutiant de perplexité, Gretchen obéit néanmoins, trop habituée à être toujours docile pour oser protester ou refuser de faire ce qu’on lui disait. Alors qu’elle frottait son visage à l’eau froide, frissonnant sous le contact glacé, la sonnette de la maison de son amie tinta.

_ J’arrive, chantonna la belge.

Curieuse, Gretchen acheva de se rafraîchir et se sécha avant de la rejoindre dans le joli salon envahi de plantes vertes. Elle n’eut pas de réelle surprise en apercevant Espagne, souriant de manière éclatante comme à son habitude. Il venait tellement souvent visiter sa bien-aimée Belgique que s’il n’avaient pas été des nations, ils se seraient sûrement mis en ménage. Derrière l’espagnol, Romano regardait fixement le sol, une moue boudeuse aux lèvres. Il ne semblait pas très heureux de se trouver là et Gretchen savait pourquoi. Elle ne manquait pas de sens de l’observation et savait que l’italien était depuis longtemps amoureux de Belgique. La savoir avec un autre devait le rendre très malheureux. Et elle savait ce qu’il ressentait, compatissant du plus profond de son petit cœur sensible.

Espagne la salua joyeusement avant de poser un baiser rapide sur les lèvres de Manon. Celle-ci lui demanda avec un grande tendresse comment il allait.

_ ‘Lut.

Gretchen leva ses grands yeux verts vers Romano, qui s’était approché. L’italien boudeur s’était toujours montré plutôt gentil avec elle et elle appréciait discuter avec lui, même s’ils avaient peu de choses en commun.

_ Bonjour, répondit-elle avec douceur.

_ Je…j’ai ap…euh, ça va ?

Romano avait rosi, étrangement gêné. Liechtenstein se demanda soudain avec une certaine frayeur combien de personnes étaient au courant de son amour unilatéral envers Suisse. Elle n’en avait parlé qu’à Belgique et Hongrie, sachant très bien que ses deux amies ne la trahiraient jamais, mais Elizabeta lui avait laissé entendre à demi-mots que rares étaient les nations ignorantes de ses sentiments. Elle se sentait stupide.

_ Oui, ça va, répondit-elle.

Elle savait que la question était la plupart du temps posée par pure forme et savait que les gens étaient gênés si on leur répondit qu’on allait mal. Ce n’était pas la réponse qu’ils attendaient. Cependant, une étrange lueur passa dans les yeux de Romano.

_ Mens pas, grogna-t-il. J’ai appris que Suisse t’avait jetée.

Liechtenstein blêmit et se mit à balbutier, cherchant désespérément un moyen de changer de sujet, histoire de ne pas se ridiculiser davantage en fondant en larmes devant le bel italien. Ce dernier avait fourré ses mains dans ses poches, l’air de plus en plus mécontent.

_ Quel imbécile, marmonna-t-il.

_ Q-quoi ?

_ Te laisser tomber. Pour l’autre coincé en plus. On se demande ce qu’il a dans la tête.

_ Ils s’aiment depuis…

_ Toi aussi, tu l’aimes, non ? Pourquoi tu t’es effacée ? Tu aurais dû te battre !

_ Mais je…

_ Bah, laisse tomber. Ça me regarde pas.

Cramoisi, Romano se détourna, tomba sur le couple enlacé plus loin et grinça des dents.

_ L’air devient irrespirable, ici.

Ni une, ni deux, il attrapa Liechtenstein par la main et l’entraîna hors de l’appartement.

_ Euh…attends…bafouilla cette dernière. T-tu vas où ?

_ On dérange, alors tu viens avec moi, je vais pas te laisser tenir la chandelle. En plus, t’as sûrement besoin de te changer les idées.

Ils empruntèrent l’ascenseur et déboulèrent dans les rues animées de Belgique un samedi après-midi. Romano cessa de tirer l’adolescente et s’excusa d’un air bourru de sa brutalité avant de lui prendre la main plus gentiment. Belgique et Espagne, sur leur nuage, ne s’étaient sûrement même pas rendus compte de leur départ précipité.

_ Je t’offre un verre.

_ Mais non, je…commença à protester Lily.

_ Mais si, j’insiste.

Le jeune homme l’entraîna à la terrasse extérieure d’un joli petit bar et l’assit galamment à une table. Elle essayait toujours de trouver des justifications pour ne pas se laisser inviter.

_ Ecoute, la coupa Romano. On est tous les deux dans la même situation. Faut se serrer les coudes.

Sos le choc, la jeune fille se tut. Faisait-il allusion à leurs amours non réciproques ? Ils n’avaient que ça en commun, à première vue.

_ Je parle de Belgique et Espagne, précisa-t-il. Ça me tue de les voir tous les deux. Mais tu le sais, hein ? Je l’ai remarqué.

Lily n’eut pas le temps de répondre que le serveur vint prendre leur commande.

_ Une grappa, commanda aussitôt Romano. Menthe, si possible. Et toi, Lily ?

Celle-ci sursauta, presque étonnée d’entendre son surnom dans la bouche du garçon. Elle ne réfléchit qu’un instant avant de répondre.

_ La même chose.

_ Vous êtes majeure ? S’enquit le serveur, l’air plutôt perplexe.

Gretchen hocha la tête en rougissant. Elle savait qu’elle avait encore l’air d’une petite fille, alors qu’elle était une nation avec une vie plus longue que les hommes pouvaient s’imaginer à son actif.

_ Imbécile, fulmina Romano une fois le serveur parti. Quel besoin il avait de te demander ça ?

_ Il ne fait que son travail, répondit Gretchen, histoire de le calmer.

_ Mouais…Mais je suis surpris, aussi. Tu vas la tenir, la grappa ? C’est pas de l’eau, hein.

_ Oui, ça ira.

_ Si tu le dis…

_ Et donc là, il…il m’a dit que…que…il m’a dit…je sais pluuuuus…

Gretchen se mit à chouiner de manière pathétique. Romano dodelina de la tête, ayant du mal à concentrer son regard sur quelque chose de précis. Il claqua des doigts d’un air autoritaire, parlant dans le vide d‘une voix pâteuse :

_ Garçon ! Une autre !

Le serveur se dirigea vers eux et les releva par le col, mécontent.

_ Pas question, refusa-t-il. Je ne vous laisserais pas me vider le stock d’alcool. En pleine après-midi, si c’est pas malheureux ! Allez décuver ailleurs, du balai !

Il les poussa hors de sa terrasse et rentra à l’intérieur en pestant contre la décadence de la jeunesse. Tremblotants sur leurs jambes qui peinaient à les porter, Romano et Lily s’éloignèrent, manquant tomber à chaque pas. Ils avaient passé deux heures à se lamenter sur leurs peines de cœur respectives, buvant verre sur verre sans même s’en rendre compte. Si Liechtenstein avait eu très chaud au premier verre et vacillé au second, le troisième l’avait laissée dans un étrange mélange entre joie stupide et tristesse à fendre le cœur. Romano avait bu six verres avant de céder à l’emprise de l’alcool.

_ On va oùùùùù ? Soupira Gretchen.

_ J’ai chaud, geignit Romano qui paraissait étonnement lucide pour un garçon totalement cuit.

Ils titubèrent encore quelque pas, puis l’adolescente tendit un bras tremblant vers un parc non loin.

_ On v…va…s’assoir…? Proposa-t-elle.

_ Oui…j’en ai besoin, approuva son compagnon d’infortune.

Lentement, ils se dirigèrent vers le parc, sans prêter attention aux regards dégoutés ou choqués des passants qui se posaient sur eux. Gretchen était prise de fou rire, ce qui l’aidait encore moins à marcher.

_ Pourquoi tu ris…? Demanda Romano.

_ Je-je sais…pas…

_ T’es bête.

_ P-peut-être…Sais pas…fait beau…c’est…t-trop bien…

Gretchen se mit à rire de manière hystérique, attrapa Romano qui ne marchait vraiment plus tout à fait droit par le col et planta un baiser vorace sur sa bouche. L


italien était trop saoul pour sen inquiéter et lui rendit son baiser avec au moins autant d’ardeur.

 

 

_ Aimer, c’est…c’est trop dur ! Bafouilla-t-elle en gloussant de manière stupide. Faut pas aimer, faut juste…juste…

Elle ne trouvait plus ses mots, trop alcoolisée pour ça. Romano la prit par la taille et brandit son poing en l’air.

_ Faut juste s’amuser ! S’écria-t-il très joyeusement.

_ C-c’est ça ! Approuva la liechtensteinoise. S-s’amuser…o-oui…reste avec m-moi…Romano…

_ Pas de souci, princesse !

L’italien tangua dangereusement avant de se laisser tomber dans l‘herbe du parc, entraînant l’adolescente dans sa chute. Tous deux ne rirent que davantage. La main du premier était pressée sur la hanche de la seconde, mais ni l’un ni l’autre ne se dégagea de cette étreinte.

_ Romano…murmura Lily.

_ Oui…?

_ Tu…tu me quitte pas…hein ?

_ Meuh non…

_ Promis-juré ?

_ Promis-juré. Pourquoi t’es comme ça ?

_ J’ai peur.

Liechtenstein s’était mise à trembler, et ce n’était plus à cause de l’alcool.

_ Suisse…i-il…n’a plus besoin de m-moi…que…je vais quoi faire m-moi…maintenant…?

_ Tu veux faire quoi…?

_ J-je sais pas…j’ai p-peur…

_ C’est pas la joie…soupira l’italien.

Il posa sa tête sur l’épaule de l’adolescente et ferma les yeux. Il se passa un instant de silence le temps qu’ils reprennent leurs esprits. Soudain, le garçon se redressa brusquement en sentant quelque chose de mouillé tomber sur le bout de son nez.

_ L-Lily…?

_ J’ai trop peur, sanglota cette dernière. J’ai peur…

Elle se jeta dans les bras de son compagnon pour y pleurer tout son soûl. Ce dernier resta figé, incapable dans son état de comprendre ce qu’il lui arrivait.

_ J’ai peur…! Répéta Liechtenstein. Je suis toute…toute seule ! Personne a besoin de moi, personne ! Si j’étais pas là, ça changerait rien, ils vivraient tous quand même ! Je suis toute seule, j’ai t-trop peur ! ! Je suis inutile…sers à rien…trop peur…

La crise était passée aussi vite qu‘elle était venue, laissant la jeune fille avec dans ses yeux humides une terrible lueur de désespoir.

_ Inutile…murmura-t-elle.

Brusquement, elle se leva, faisant tomber Romano qui se cogna la tête par terre.

_ Hé ! Protesta-t-il.

Mais Gretchen s’était déjà éloignée, d’un pas si vif qu’on avait peine à croire qu’elle avait du mal à marcher quelques minutes auparavant. L’alcool l’avait semble t-il mise en folie. L’italien se leva avec difficulté et la suivit de loin.

_ Tu vas où ? Demanda-t-il faiblement.

_ Loin ! Fut la réponse sèche qu’il reçut.

_ Où ça loin ?

_ Très, très loin.

Elle entra dans le premier immeuble venu, à la grande surprise de son compagnon qui s’engagea à sa suite. Ils montèrent sans s’arrêter les cinq étages et débouchèrent sur le toit. A cette hauteur, le vent soufflait très fort, les cheveux et la robe de Liechtenstein étaient agités dans tous les sens.

_ Tu fais quoi, là ? Demanda une nouvelle fois Romano.

_ Je pars, lâcha, glaciale, la petite nation.

Sûre d’elle, elle monta sur le parapet et regarda en bas, sans peur. Romano fronça les sourcils, semblant commencer à comprendre.

_ Hé, fit-il.

_ Je vais partir loin, et laisser tout le monde tranquille. Je veux plus gêner.

_ Tu peux pas mourir en sautant d‘un toit, t’es une nation.

_ Si ça ne marche pas, j’essaierais. Encore et encore. Je trouverais un moyen.

Les yeux fixés vers le bras, Liechtenstein avança un peu. Le bout de ses chaussures pendaient déjà dans le vide. Plus qu’un tout petit pas…

_ Attends ! ! Rugit Romano.

D’un seul coup, l’italien se jeta en avant et l’attrapa par sa robe, la tirant en arrière. Elle bascula et tomba de son parapet, atterrissant sur lui sans la moindre douceur. Ils tombèrent tous les deux à la renverse.

_ Qu’est-ce que tu as fait ? S’écria Liechtenstein.

Pour sûrement la première fois de sa vie, elle semblait fâchée. Furieuse, même. Elle cogna de son petit poing le torse de Romano, qui paraissait hébété.

_ Pourquoi tu m’as empêchée de sauter ? !

_ Tu…

_ Je ne voulais plus être un fardeau pour les autres ! Mais enfin, pourquoi tu m’as empêchée de faire ce qu’il fallait ? ! Qu’est-ce qui te prends de te mêler de mes affaires, je ne suis rien pour toi, pourquoi ? ! Moi, je voulais juste disparaître, j’avais peut-être que cette chance, et toi, toi, il a fallu que tu viennes tout gâcher ! !

_ Mais tu dois pas mourir, est-ce que tu te rends compte ? ! Tu es une nation ! Des tas de gens t’aiment et comptent sur toi, tu te rends compte de ce que tu allais faire ? !

Romano avait haussé la voix, tout aussi furieux qu’elle l’était. Sans ménagement, il l’empoigna par les épaules et la repoussa, comme si son contact le dégoutait brusquement.

_ Tu les aurais abandonné ! ! Rugit-il. Tu…tu…!

Il s’en étouffait presque de colère. Sous le coup de l’émotion, choquée de se trouver rejetée, Liechtenstein le gifla.

_ Je n’abandonne personne ! Hurla-t-elle. Je ne suis pas une lâche ! J’ai toujours pris mes responsabilités, je me suis toujours sacrifiée pour les autres, de quel droit, mais de quel droit est-ce tu m’accuses comme ça ? !

Elle éclata en sanglot, dépassée par tous ces sentiments négatifs qu’elle ressentait. Eberlué par son comportement et un peu honteux de ses mots trop crus, le garçon posa une main un peu tremblante sur ses cheveux dans un geste tendre, quoique maladroit, pour la réconforter.

_ Tu dois pas mourir…murmura-t-il.

_ Mais je gêne tout le monde ! S’écria Lily, en larmes. Je gêne Suisse et Autriche parce que je l’aimais et qu’ils voulaient pas s’aimer pour pas que je sois triste ! Je gêne Belgique et Hongrie quand elles sont avec les gens qu’elles aiment ! Je te gêne, toi !

_ Non…

_ Mais si ! Tout le monde se force à rester avec moi pour pas que je sois triste, je suis un fardeau pour tout le monde. J’aurais déjà dû disparaître ! C’est trop dur, trop dur ! Pourquoi tout ça m’arrive à moi, hein ? J’ai jamais rien demandé ! Et puis, Suisse…c’est tellement horrible ! Je déteste, le déteste, et puis non, tous les deux ! Pourquoi lui, hein ? ! Deux hommes, c’est pas…c’est pas naturel ! Mais pourquoi, pourquoi il a fallu qu’il aime cet homme ! Si encore il avait aimé une femme, j’aurais eu moins mal, j’aurais moins souffert, j’aurais su que j’avais quand même une chance, qui sait ! Mais il a fallu…il a fallu que ce soit ça…Comment je peux lutter, moi ? ! Pourquoi il m’a sauvée si c’était pour que ça se finisse comme ça ! J’aurais dû disparaître ce jour-là, je n’aurais pas dû survivre. Je ne devrais pas être encore là. Je devrais même plus exister !

_ Bah, moi non plus ! S’exclama Romano.

L’adolescente lui lança un regard étonné à travers ses larmes.

_ Q-Quoi ?

_ L’Italie a peut-être deux représentants, mais tout le monde sait que c’est Feliciano le vrai Italie. C’est Feliciano qui est gentil, joyeux, aimant et aimé, le meilleur en tout. Moi, après tout, je suis juste Romano, le chieur de service. C’est moi qui emmerde tout le monde ! Je sais pas ce que je fais encore ici. Je sais pas quelle est mon rôle dans ce monde !

Eberluée, Lily l’observait s’assombrir, ses yeux se remplir de larmes. Il poursuivit, la voix rauque :

_ Moi aussi, je suis tout seul. Que ce soit mon frère ou la fille que j’aime, ils ont chacun leur propre âme-sœur. Ils sont gentils, hein, mais je leur demande pas de la compassion. Je veux pas leur pitié ! Ça me fait plus mal qu’autre chose !

_ Moi aussi…chuchota-t-elle. Je ressens la même chose…

Elle se blottit contre lui, des larmes coulant à nouveau sur ses joues, mais de manière plus calme.

_ On a peur…

_ On se sent inutile…poursuivit Romano.

Il l’entoura de ses bras, comme s’il souhaitait la protéger de toutes les menaces extérieures, comme s’il espérait par ce geste chasser toutes ses peurs et ses démons, et les siennes par la même occasion.

_ Je veux pas disparaître, chuchota Liechtenstein en s’accrochant à lui. J’ai peur, j’ai trop peur. J’ai toujours peur, peur de tout. Peur l’inconnu, peur de l’après. Ça fait trop peur. Serre-moi fort. S’il te plaît…

Romano obéit et plongea son visage dans les cheveux doré de la jeune fille.

_ J’ai peur aussi…dit-il. Mais je veux pas disparaître moi non plus. Je veux vivre…Je veux être vivant.

Liechtenstein gigota pour entourer le large dos de son compagnon d’infortune de ses bras frêles.

_ Serre-moi juste très fort. Jusqu’à étouffer. Prouve-moi que je suis vivante, que j’existe, s’il te plaît. Au moins à tes yeux. Je veux exister au moins pour toi, puisque tu te sens seul toi aussi…

_ Moi aussi, je veux exister pour quelqu’un…

_ Alors, pour cette fois…juste pour cette fois…un petit peu de tendresse…

Liechtenstein leva la tête pour plonger son regard dans celui de Romano. Ce dernier la regarda avec ardeur, et pris son petit visage en coupe entre ses larges paumes. Il se pencha vers l’elle et joignit très doucement leurs lèvres. Baiser chaste et prudent qui n’était que le prélude à la suite. Rapidement, un autre suivit, moins timide, et encore un autre. La cadence s’accéléra, la chaleur monta, les mains s’enhardirent. Romano empoigna les hanches de la jeune fille pour la coller à et elle s’accrocha à ses épaules comme si sa vie en dépendait.

_ A-attends un peu, grogna l’italien à contrecœur en sentant les doigts de Lily s’attaquer aux boutons de sa chemise.

_ Non.

_ On fait une connerie !

_ De toute façon, c’est trop tard…

Elle l’embrassa encore une fois et il se laissa à nouveau emporté par la folie. Gretchen avait raison, il était trop tard. Ni lui ni elle ne pouvaient plus s’arrêter, ils en avaient besoin, les deux âmes solitaires et perdues sur le sens de leur existence. Ils avaient juste besoin de se sentir exister un instant. Mieux valait après tout qu’ils se retrouvent entre eux, honnêtes et sincères, plutôt qu’avec d’autres personnes, probablement moins bien intentionnées, qui n‘auraient pas compris leur souffrance.

Ils étaient seuls au monde. Mais ils étaient seuls à deux. Et ils ne firent bientôt plus qu’un. Juste pour un instant.

_ Mais où étiez-vous passé ? S’étonna Espagne.

Liechtenstein et Romano venaient de rentrer chez Belgique, après avoir doucement frappé à la porte. Le couple les attendait, visiblement inquiet. Manon s’était précipitée pour prendre son amie dans ses bras.

_ Je me suis fait du souci ! Balbutia-t-elle. Tu aurais pu me prévenir, j’ai cru que…oh, ne me refais plus jamais ça ! Tu es toute pâle, tu ne te sens pas bien ? Viens, viens t’allonger…

Elle la soutint très doucement et l’escorta jusqu’à la chambre qu’elle occupait. Romano dessinait des formes vagues du bout de son pied sur la moquette crème sans oser lever les yeux.

_ Vous étiez où ? Demanda Antonio.

_ Bah…en bas…murmura l’italien.

_ En bas ?

_ Dans un bar, crétin ! Explosa Romano. Vous étiez bien, tous les deux, on voulait pas gêner alors on est descendus prendre un verre, voilà, t’es content ? !

Espagne parut peiné de la réaction de son protégé.

_ Je me suis juste inquiété, dit-il avec un soupir.

Romano se contenta d’hausser les épaules, se sentant coupable mais incapable dans sa fierté de l’avouer. Il était titillé par l’envie de se blottir dans les bras de son ex-tuteur pour y pleurer tout son soûl, pour se confier à lui sans pudeur et se faire réconforter, comme lorsqu‘il était enfant. La culpabilité qu’il ressentait à propos de ce qu’il avait fait à Liechtenstein lui pesait, mais il n’osait pas s’épancher. Il ne le pourrait jamais, il ne voulait pas détruire la jeune fille un peu plus qu’elle ne l’était déjà. Il allait devoir porter ce lourd secret le restant de son éternelle vie de nation. Le programme n’était guère alléchant.

_ Bah voilà, on est rentré, plus besoin de s’inquiéter, siffla-t-il pour chasser ses idées noires en étant désagréable. Fin de l’histoire.

_ Oui, oui…

_ Et arrête de prendre cet air de chien battu ! !

_ P-pardon…

Belgique caressa les fins cheveux de Liechtenstein qui s’était blottie dans son lit, le regard mélancolique.

_ Tu ne veux pas me parler ? Demanda-t-elle.

L’adolescente se contenta de secouer la tête de manière négative.

_ Il s’est passé quelque chose avec Romano ? Insista Manon. Vous sembliez bizarre…

_ N-non, bafouilla Lily en se cachant le visage pour maquer son visage brûlant. Il a été gentil. On a discuté. C-c’est tout…mais…

_ Mais ?

_ On a…on a…

Elle se tut : elle n’allait quand même pas avouer ce qu’il s’était passé, non ? Tous les deux s’étaient oubliés dans un moment de désespoir, leur acte n’avait pas été fait avec amour. Ce n’était pas bien, non ? Elle ne voulait pas être mauvaise. Et elle ne voulait pas causer du tort à Romano envers qui elle se sentait bien, comprise. Ils étaient pareils, elle ne pouvait pas lui faire ça. Il valait mieux garder le secret, c’était mieux pour tout le monde, eux les premiers. Personne n’aurait pu comprendre.

_ On a parlé…de choses qui n‘étaient…pas forcément…agréables…dit-elle pour se justifier.

_ Je vois.

Son amie continua à lui caresser les cheveux un moment, jusqu’à ce que l’adolescente finisse par s’endormir.

_ Je vois même trop bien, acheva Manon dans un souffle pour ne pas la réveiller.

Deux larmes roulèrent sur les joues de Liechtenstein endormie.

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